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Accord UE-USA sur les PNR : l'UE met en danger la sûreté des citoyens et résidents européens


Communiqué de presse d'IRIS - 6 octobre 2006


Selon les premières dépêches, un nouvel accord a été trouvé ce jour entre les États-Unis et l'Union européenne sur le transfert aux USA des données personnelles des passagers aériens européens (Passenger Name Records ou PNR). Ce transfert, en vigueur depuis plus de deux ans, était devenu illégal depuis le 30 septembre 2006, suite à son annulation par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) pour défaut de « base juridique appropriée ».

La CJCE ne s'étant pas prononcée sur le fond de l'accord, en particulier sur la violation du droit à la vie privée, les États-Unis avaient, sans surprise, saisi cette opportunité pour tenter de renégocier l'accord afin de l'élargir encore plus. Ils réclamaient, toujours brandissant la menace de sanctions financières, voire d'interdiction d'atterrissage sur le sol américain pour les compagnies aériennes européennes, l'extension du champ des données à transférer (34 données l'étaient déjà), de la durée de leur conservation (3 ans et demi jusqu'ici), et des agences américaines de sécurité destinataires des données (auparavant uniquement les services des douanes et de la police des frontières). Le nouvel accord porte sur la demande essentielle des États-Unis, puisqu'il leur permet désormais de fournir ces données à toutes les agences américaines chargées de la lutte anti-terroriste.

Rappelons que les 34 données des citoyens et résidents européens qui leur seront fournies permettent de révéler les pratiques religieuses (repas casher ou hallal), l'état de santé (repas ou autres services spécifiques), les informations bancaires (mode de paiement des prestations), les personnes qui voyagent ensemble (réservations groupées), les localisations et déplacements sur le territoire américain (réservation de prestations annexes comme hôtel, voiture...), les historiques de voyage sur plusieurs mois (programmes de fidélisation des compagnies aériennes) et, bien entendu, les identités complètes des passagers et l'ensemble de leurs coordonnées, y compris téléphoniques.

Pour justifier sa décision, l'Union européenne s'est constamment dite forcée d'accéder aux demandes des États-Unis, afin de protéger le secteur aérien européen et plus généralement l'activité économique transatlantique. Mais plusieurs États membres de l'Union ont entre-temps eux-mêmes mis en place la fourniture de telles données à leurs propres services de police et de renseignement. C'est par exemple le cas de la France avec la loi Sarkozy de lutte contre le terrorisme de janvier 2006. Il apparaît donc clairement que les États membres de l'UE n'ont aucun intérêt à contester la circulation et l'utilisation de telles données personnelles. Ainsi, cité ce jour par l'AFP, un haut fonctionnaire de la Commission européenne déclarait : « Nous pensons que les données des passagers peuvent être un instrument utile dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé ».

Quand on sait l'ampleur de l'entendement américain et, de plus en plus, européen, de la « lutte anti-terroriste », ainsi que la disponibilité d'autres données comme les données de communication téléphonique et électronique fixe ou mobile (voix et données) on comprend aisément à quel point un tel accord viole la vie privée des citoyens et résidents européens, et risque même de mettre en danger leur sûreté face à l'arbitraire.

L'accord négocié ce matin doit être signé dans les prochains jours. Il est provisoire, et doit être rediscuté en juillet 2007, toujours en vue de son élargissement pour répondre aux demandes non encore satisfaites des États-Unis. Il est encore possible de mettre en demeure la CJCE de se prononcer sur le fond de l'accord, à travers une saisine du Parlement européen, par exemple. Il est également possible pour des citoyens européens concernés de saisir la Cour européenne des droits de l'homme. Mais l'urgence réside dans la mobilisation de chacun de nous, citoyens et résidents européens, contre la violation toujours plus importante de nos droits, et désormais la mise en danger de notre sûreté même.

Pour plus de détails, voir :
- Communiqué IRIS du 31-05-06 : « Vigilance toujours de rigueur après l'annulation de l'accord UE-USA de transfert des données PNR »
http://www.iris.sgdg.org/info-debat/comm-cjcepnr0506.html
- Dossier d'IRIS sur les PNR :
http://www.iris.sgdg.org/actions/pnr/
- Article Libération du 06-10-06 : « Fichage aérien : toujours plus pour Washington »
http://www.liberation.fr/actualite/monde/208937.FR.php
- La position préconisée par la CNIL avant la renégociation de l'accord
http://www.cnil.fr/index.php?id=2129

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