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Responsabilité des intermédiaires techniques :
le député Patrick Bloche renie ses propres amendements

Communiqué de presse d'IRIS - 20 mars 2000

La Commission des Affaires culturelles de l'Assemblée nationale a adopté le 8 mars 2000 ses propositions d'amendements à la loi sur la liberté de communication, qui sera examinée en deuxième lecture à l'Assemblée à partir du 21 mars 2000.

Concernant Internet et la responsabilité des intermédiaires techniques, la Commission a adopté les propositions du député Patrick Bloche (PS) de supprimer plusieurs des modifications introduites par le Sénat :
   - institution d'un conseil supérieur des technologies de l'information,
   - référence à Internet comme un service de communication audiovisuelle,
   - obligation pour les fournisseurs Internet de s'assurer de l'identité de leurs abonnés,
   - responsabilité des fournisseurs dans de nombreux cas relevant de la simple activité de prestataire d'accès ou de service.

Iris se félicite de la suppression de ces dispositions introduites par le Sénat, qui avaient été commentées et qualifiées de réactionnaires par l'association dans son communiqué de presse daté du 23 janvier 2000 [1].

En revanche, il semble que le député Patrick Bloche ait cédé aux pressions multiples, du gouvernement comme de certaines associations, au point de renier ses propres amendements, adoptés par l'Assemblée nationale en première lecture le 19 mai 1999 [2,3].
Le député, suivi par la Commission des Affaires culturelles, propose en effet d'étendre ses amendements, de sorte que la responsabilité des fournisseurs soit engagée si, « ayant été destinataires d'une mise en demeure d'un tiers estimant que le contenu qu'elles hébergent de manière directe et permanente est illicite et lui cause un préjudice, elles n'ont pas procédé aux diligences appropriées, l'autorité judiciaire demeurant seule juge du caractère illicite du contenu en cause ».

Malgré des précautions toutes rhétoriques (« l'autorité judiciaire demeurant seule juge du caractère illicite du contenu en cause »), la nouvelle rédaction proposée par Patrick Bloche met bel et bien tout contenu critique ou déplaisant à la merci de la première mise en demeure adressée à un fournisseur d'hébergement. La notion de « diligences appropriées » restant à l'appréciation de tribunaux dont les décisions sont pour le moins variables [4], le fournisseur d'hébergement aura vite fait de se plier à n'importe quelle mise en demeure par simple lettre recommandée ou par voie d'huissier, pour supprimer tout contenu litigieux sans aucune possibilité de procédure contradictoire : il est plus que probable en effet que, dans de nombreux cas, l'autorité judiciaire ne sera même pas saisie, l'auteur de la mise en demeure ayant obtenu satisfaction par le « nettoyage » ainsi diligentement effectué.

Iris regrette profondément que Patrick Bloche, dans un souci de recherche de compromis improbable, dénature ainsi lui-même ce qu'il avait pourtant jusqu'ici eu le courage de défendre : le respect de la démocratie et de la liberté d'expression, sans pour autant déresponsabiliser ni les auteurs de contenus, ni les intermédiaires techniques.

La discussion à l'Assemblée nationale laisse encore la possibilité de modifier cette proposition, qui semble d'ailleurs rédigée bien hâtivement (extension à la responsabilité pénale, mais limitée aux atteintes aux droits des tiers : contre quel type de contenus veut-on lutter exactement ?!) [5].
Iris espère encore que les députés, à commencer par Patrick Bloche lui-même, sauront revenir au texte de l'amendement adopté en première lecture en l'étendant correctement à la responsabilité pénale, afin de faire triompher la démocratie et les libertés sur la loi du plus fort lobby.

Références :
[1] Iris dénonce une dérive lourde de dangers : avec le Sénat, les fournisseurs Internet deviendraient à la fois policiers, juges et censeurs. Communiqué de presse Iris, 23 janvier 2000. http://www.iris.sgdg.org/info-debat/comm-senat0100.html
[2] Amendements Bloche : l'espoir d'un Internet démocratique. Communiqué de presse Iris, 18 mai 1999. http://www.iris.sgdg.org/info-debat/amend-bloche0599.html
[3] Adoption des amendements Bloche : un vote en faveur de la démocratie et des libertés. Communiqué de presse Iris, 31 mai 1999. http://www.iris.sgdg.org/info-debat/vote1-an0599.html
[4] Fournisseurs d'hébergement : ni responsables, ni coupables, mais solvables. Communiqué de presse Iris, 16 décembre 1999. http://www.iris.sgdg.org/info-debat/comm-nanterre1299.html
[5] Suivi des travaux parlementaires sur loi sur la liberté de communication. Dossier complet d'Iris, régulièrement mis à jour. http://www.iris.sgdg.org/actions/loi-comm

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