Sommet Mondial sur la Société de l'Information
Genève 2003 - Tunis 2005
Colloque international sur
la société de l'information, la dignité humaine et les droits de l'homme
Palais des Nations, Genève 3-4 novembre 2003Déclaration sur les droits de l'homme, la dignité humaine et la société de l'information
Cette déclaration a été élaborée et adoptée par un groupe d'experts indépendants, de toutes les régions du monde, représentant divers domaines d'activités, de compétences, de nationalités et de perspectives, se réunissant au Palais des Nations à Genève, le 3 et 4 novembre 2003. Le groupe s'est réuni sur l'initiative du Mouvement des Peuples pour l'Education en faveur des Droits de l'homme, avec le soutien de l'Agence Suisse pour le Développement et la Coopération, la Commission Européenne, le Bureau du Haut-Commissaire pour les Droits de l'Homme, et le gouvernement du Mali qui préside le réseau pour la sécurité humaine. La liste des participants à ce colloque est jointe en annexe.
1. Au milieu du 20ème siècle, la communauté internationale a reconnu les droits de l'homme comme constituant le cadre normatif commun, au moment où des avancées extraordinaires apparaissaient dans l'information numérique et génétique. Avant même l'avènement du 21ème siècle, un système de normes et de mécanismes, relatif aux droits de l'homme, d'une valeur inestimable, était déjà en place, et par le biais de l'éducation en faveur des droits de l'homme, et de leur apprentissage, compris dans le sens large du terme, "une culture des droits de l'homme" a commencé à prendre racine, dans plusieurs parties du monde. Simultanément, des progrès importants dans les technologies de l'information et de la communication ont créé la "société de l'information", incitant de larges segments de la population, principalement dans les pays développés, à modifier leur manière de communiquer et de vivre. Ces deux tendances, celle d'une culture des droits de l'homme et celle de la société de l'information, sont étroitement liées et portent en elles le potentiel d'un renforcement mutuel.
Obligations des états ayant souscrit aux droits de l'homme dans le contexte SMSI
2. Le développement de la société de l'information, plus particulièrement la vision qu'en présente le Sommet Mondial sur la Société de l'Information, doit être construite sur la réaffirmation de la Déclaration et du Programme d'Action de Vienne 1993, adoptés par la Conférence Mondiale sur les Droits de l'Homme, selon lesquels les droits de l'homme sont universels, indivisibles, étroitement liés et interdépendants, et que leur protection est la responsabilité première des gouvernements. Les états ayant souscrit aux obligations des droits de l'homme se sont engagés à la Charte des Nations unies. En vertu de tous les autres instruments des droits de l'homme élaborés par les Nations unies et sur un plan régional, ils ont le devoir de s'assurer que la société de l'information et de la communication n'a pas pour conséquence une discrimination ou une privation des droits de l'homme, causée par les actions ou les opinions de leurs agents ou des acteurs privés placés sous leur juridiction. Ils ont aussi des engagements vis-à-vis des droits de l'homme, contractés à l'occasion d'autres conférences ou sommets internationaux. Le SMSI offre une occasion importante pour réaffirmer les droits de l'homme dans le cadre de la politique de l'information et de la communication. Il existe une prise de conscience accrue au sein des dirigeants du SMSI sur l'importance des droits de l'homme dans ce cadre. Des mesures satisfaisantes ont été prises pour faire écho à la voix et aux préoccupations de la société civile dans le processus du SMSI. Il sera nécessaire d'obtenir un meilleur engagement et une meilleure transparence concernant les droits de l'homme pour permettre au Sommet de réaliser tout son potentiel.
3. Il faudrait attendre des pays hôtes et des institutions contribuant au processus du SMSI après Genève, un respect total des principes énoncés dans la déclaration adoptée au sommet de Genève y compris ceux ayant trait aux droits de l'homme qui sont essentiels à la société de l'information et de communication. Il s'agit tout particulièrement de la liberté d'expression, d'association et d'information de la société civile. Ceci s'applique également aux ONG présentes.
4. Conformément à ces responsabilités, les gouvernements participant aux SMSI ne devrait pas se contenter de renforcer la société de l'information et de la communication comme moyen de promotion des Objectifs de Développement du Millénaire et de Réduction de la Pauvreté, mais ils doivent faire en sorte qu'elle contribue à la promotion et au respect de tous les droits de l'homme, sur les plans civil, culturel, économique, politique et social. Encadrée par les droits de l'homme, la société de l'information et de la communication est en mesure de promouvoir la libération de tous les êtres humains, de la peur et du besoin, contribuer à leur sécurité, faire avancer le développement durable et renforcer l'égalité entre les hommes et les femmes.
5. Les droits de l'homme qui représentent une importance toute particulière pour la société de l'information et la communication sont la liberté d'expression et d'information, l'absence de discrimination, l'égalité entre les hommes et les femmes, le droit à la vie privée, le droit à une justice équitable, la protection des droits d'ordre moral et matériel sur les créations intellectuelles, le droit à participer à la vie culturelle, les droits des minorités, le droit à l'éducation et le droit à un niveau de vie acceptable, notamment à la santé, à une alimentation convenable, et à un logement décent. L'ensemble de ces droits fait partie intégrante du corps des droits de l'homme internationalement reconnus, et doit être disséminé par le biais de la société de l'information et de la communication.
Défis posés par la société de l'information et de la communication aux droits de l'homme
6. Plusieurs tendances caractérisant l'information et la communication dans une grande partie du monde aujourd'hui, constituent des défis et dans de nombreux cas, de graves dangers à une société de l'information, fondée sur les droits de l'homme. Les plus gros défis se posent par l'exclusion de la plupart des personnes des pays en voie de développement, des bénéfices des progrès réalisés dans le domaine de l'information numérique et génétique, la transformation de l'information et des connaissances en biens matériels et la concentration croissante de la propriété et du contrôle des moyens de production et de dissémination des informations et de connaissances. Tout aussi graves sont les restrictions, la surveillance et la censure imposées par l'état ou par des parties privées, particulièrement après le 11 septembre 2001.
7. Les grosses disparités dans l'accès à l'information et aux moyens de communication- baptisés "fracture numérique"- sont la conséquence d'une répartition inéquitable de la richesse entre les différents pays et au sein de ceux-ci. La fracture numérique est à la fois une cause et une conséquence de cette distribution inéquitable des richesses entre les différents pays et au sein de ceux-ci. Tout comme la pauvreté à laquelle elle est étroitement liée, elle diminue fortement la capacité des personnes à jouir de leurs droits. Les technologies de l'information et de la communication offrent capacités et pouvoir aux individus et aux groupes, particulièrement ceux qui sont exposés, marginalisés ou vulnérables. Et à moins que ces technologies de l'information et de la communication ne soient mises à disposition de ceux qui sont à l'extrémité perdante de la fracture à une vaste échelle, la société de l'information et de la communication restera une force d'appauvrissement relatif pour de larges pans de la population mondiale et par conséquent une source d'instabilité et de privation.
8. La fracture numérique a pour conséquence un accès inégal à l'information et aux moyens de communication et d'information. Par conséquent elle crée une exclusion massive. Toutes les voies doivent être explorées pour assurer un accès équitable et abordable à l'information, aux moyens de communication et à la technologie et infrastructure nécessaires. Les autorités publiques, le secteur privé et la société civile dans les pays développés assument une responsabilité toute particulière, celle de partager les bénéfices de la société de l'information et de la communication avec les peuples des pays en voie de développement.
9. La société de l'information et de la communication offrent une occasion sans précédent de faire progresser le partage des connaissances dans des domaines vitaux au développement humain. Les technologies de l'information et la communication sont particulièrement inestimables pour la réalisation des droits à la santé, à l'éducation, et à une alimentation convenable grâce à la diversité de leurs gammes. Il convient d'accorder une attention particulière à l'utilisation de la société de l'information et de la communication dans le but de promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes, conformément aux principes énoncés dans la Déclaration et le Programme de Vienne, stipulant que les droits des femmes sont des droits humains. Les droits de l'homme dans les cultures traditionnelles de la société d'information émergentes, nécessitent des mesures spéciales pour la conservation et la protection de leurs connaissances et culture traditionnelles. Des mesures spécifiques sont également nécessaires pour améliorer la situation des personnes vulnérables, exposées ou exclues et les protéger, en particulier les enfants, les personnes âgées, les handicapés, les minorités, les réfugiés et les demandeurs d'asiles.
Education et apprentissage en faveur des droits de l'homme
10. La société de l'information et de la communication bénéficie des nouvelles technologies qui servent des fonctions vitales pour l'éducation et l'apprentissage en faveur des droits de l'homme, et plus généralement contribuent au changement social par la réalisation des droits de l'homme.
11. Les technologies de l'information et la communication doivent être mises au service de l'éducation et de l'apprentissage continu pour tous. Tout particulièrement, étant des instruments privilégiés de l'éducation et de l'apprentissage en faveur des droits de l'homme, ils doivent aider à rendre possible et à permettre aux humains dans le monde , à travers les générations et les cultures, à connaître, réclamer et posséder leurs droits et à respecter et promouvoir les droits des autres dans un esprit de solidarité. Les technologies de l'information et de la communication permettront une contribution majeure au développement de la société sur la base d'une culture des droits de l'homme partagée par tous.
Liberté d'expression et d'information
12. Le respect total de la liberté d'expression et d'information par les acteurs étatiques et privés est une condition préalable indispensable à la construction d'une société d'information et de communication libre et sans exclusion. Les technologies de l'information et de la communication ne doivent pas être utilisées pour limiter cette liberté fondamentale. Il ne doit pas y avoir de censure, de contrôles arbitraires ou de contrainte exercés sur les participants au processus d'information, par rapport au contenu de l'information, sa transmission et sa dissémination. Le pluralisme des sources d'informations et des médias doit être protégé et encouragé. Toute restriction à la liberté d'expression et d'information doit poursuivre un objectif légitimé par le droit international, doit être prescrit par la loi, doit rester strictement proportionnel à un tel objectif et doit être indispensable à une société démocratique pour assurer le respect des droits ou de la réputation des autres, la protection de la sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé publique ou de la moralité. La législation sur la sécurité nationale en vue de combattre le terrorisme, doit respecter les normes de liberté d'expression et d'information et doit être soumise à un examen judiciaire et à une analyse internationale approfondie.
13. L'article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et les Dispositions Internationales sur les Droits Civils et Politiques revêtent une importance fondamentale dans une société d'information et de communication fondée sur les droits de l'homme, non seulement du fait qu'ils exigent que tout un chacun ait le droit à la liberté, d'opinion et d'expression, et le droit de rechercher, de recevoir et de faire circuler l'information et les idées par n'importe quel médium et sans considération de frontières, mais aussi parce qu'ils impliquent la libre circulation des informations et des idées, la liberté de la presse, et la disponibilité des outils permettant d'accéder aux informations et partager la connaissance.
14. La tendance à fournir un accès public aux informations produites et gérées par les gouvernements et protégées par la législation sur "la liberté d'information" doit être étendue à tous les pays qui n'ont pas de telle législation, assurant que les informations contrôlées par les gouvernements sont opportunes, complètes et accessibles dans un format et une langue que le public est à même de comprendre.
15. La liberté d'expression sur l'Internet doit être protégée de la même façon qu'elle est protégée hors Internet. Les fournisseurs d'accès à l'Internet doivent être guidés par cette liberté plutôt que par des codes de conduites qui ne sont pas fondés sur les droits de l'homme.
Le droit à la protection de la vie privée
16. La technologie moderne peut et doit être utilisée pour la protection de la vie privée. Simultanément, elle ouvre une voie sans précédent pour des violations massives du droit à la vie privée. L'utilisation de moyens de surveillance et d'interceptions de communications de plus en plus envahissants, le recours à des techniques de détermination et de définition de profils et à la technologie d'identification de paramètres biométriques, le développement de technologies de communication avec des capacités de surveillance intégrées, la collecte de données génétiques utilisées à mauvais escient, les tests génétiques, l'intrusion croissante dans la vie privée sur les lieux de travail et l'affaiblissement des systèmes de protection de données suscitent de graves préoccupations quant à la protection du droit à la vie privée. De nouveaux moyens doivent être mis en place dans le but de protéger ce droit. Ainsi, le droit à connaître les données personnelles détenues par des institutions publiques et privées doit être assuré, de même que la possibilité de les supprimer lorsque leur détention n'est pas indispensable au service d'un but strictement légal dans une société démocratique. Le développement, le transfert et l'utilisation de la technologie permettant une invasion illégale de la vie privée, doivent être contrôlés et réduits.
17. Pour comprendre la société de l'information, il est primordial de reconnaître que l'information est synonyme de pouvoir. Le contrôle d'informations d'ordre privé et la privation du droit à la vie privée sont des moyens d'exercer un pouvoir sur des individus. La protection d'informations personnelles et de la vie privée est indispensable à l'autonomie d'une personne et au respect des droits de l'homme. La grande expérience acquise lors de l'élaboration des législations et d'une jurisprudence nationales et internationales pour la protection de la vie privée doit être examinée et appliquée dans les pays où le droit à la vie privée ne bénéficie pas d'une protection convenable. Il convient par ailleurs de s'inspirer des bonnes pratiques en vigueur.
18. Le développement des infrastructures de communication et d'informatique omniprésente menace la vie privée d'une manière envahissante et nouvelle. Néanmoins, il est possible de susciter et d'adopter un comportement susceptible de renforcer la vie privée, et des technologies et infrastructure compatibles avec la législation sur la protection de la vie privée. Ces choix doivent être favorisés par la législation nationale, les codes de déontologie suivis par les concepteurs et par des incitations commerciales. Les mesures de protection de la vie privée aux niveaux international, régional, national, communautaire, institutionnel et individuel, doivent débuter par l'élaboration de législations nationales sur la protection des données pour protéger les droits des individus concernant la collecte, l'utilisation et la divulgation des informations personnelles avec supervision adéquate et accès à une réparation effective. L'éducation à travers tous les secteurs de la société concernant les droits à la vie privée et les risques inhérents à la technologie, est indispensable pour que les individus puissent prendre les mesures nécessaires à la protection de leurs droits légaux.
19. Certaines mesures prises dans la lutte contre le terrorisme et la cybercriminalité ont sapé les libertés civiles et abrogé les droits à la vie privée. La coopération dans le domaine des enquêtes criminelles doit s'accompagner d'une application satisfaisante des libertés civiles et d'une supervision indépendante de la collecte des données.
Droits culturels et linguistiques et diversité
20. De plus en plus, la communauté internationale considère la pluralité des identités, notamment la diversité culturelle, comme un atout et une valeur fondamentale, qu'il convient de défendre et d'encourager. Le renforcement de la diversité est essentiel pour le respect des droits culturels, la promotion de la tolérance et la lutte contre la discrimination à tous les niveaux de la société. La préservation et la promotion de la diversité culturelle et linguistique et l'interaction, doivent être les marques de noblesse d'une société assoiffée d'information. Les technologies de l'information et de la communication peuvent et doivent être utilisées pour promouvoir la diversité et le respect des droits et identité culturels, notamment la connaissance indigène, plutôt que pour les limiter et les supprimer. Cette diversité se reflète d'une manière flatteuse par la radio communautaire, les moyens indigènes de communication et les médias locaux.
21. Les personnes vivant dans une société de l'information sont plus que de simples consommateurs ; ils sont également les fournisseurs d'information et de créativité. Des mesures doivent donc être prises pour leur garantir l'accès à l'infrastructure dans des conditions économiques convenables. A cette fin, les gouvernements doivent prendre des mesures actives, en vertu des exceptions culturelles et linguistiques aux accords commerciaux internationaux.
Le domaine public et les droits de propriété intellectuelle
22. Toute croissance de la société de l'information est tributaire d'un domaine public riche, réservoir d'où toute nouvelle connaissance prend source. Chacun doit donc jouir du droit réaffirmé dans l'article 27 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, de participer librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir de l'art et de partager les bienfaits des progrès scientifiques et ses bénéfices tout en ayant le droit à la protection des intérêts d'ordre moral et matériel découlant de toute production scientifique, littéraire ou artistique. Les accords et les traités internationaux, et les politiques nationales concernant la création, le partage et le commerce des biens intellectuels et les créations culturelles doivent s'aligner à ces besoins qui se font concurrence. La facilitation d'une participation significative de tous, en particulier des organisations de la société civile, dans le développement d'un cadre de la propriété intellectuelle est une partie essentielle d'une société de l'information qui n'exclut personne.
23. Il est nécessaire de promouvoir les initiatives en faveur de logiciels et de plates-formes neutres sur le plan technologique, de source libre et relevant du domaine public ainsi que le développement de normes ouvertes, compatibles entre elles, non-discriminatoires et fondées sur la demande, prenant en compte les besoins des utilisateurs, des consommateurs et des personnes défavorisées. En outre, un certain pourcentage déterminé du spectre, du satellite et d'autres capacités de bande passante, devrait être affecté à l'utilisation éducative, humanitaire, communautaire et à d'autres aspects non-commerciaux.
24. La concentration de la propriété dans les mains de quelques grandes entreprises limite les capacités des technologies de l'information et de communication à refléter le pluralisme des perspectives et la diversité des cultures d'une manière adéquate. Les mesures législatives et autres doivent éviter la concentration excessive des médias et s'assurer que les médias et les technologies de l'information et de la communication répondent au principe de service public et garantissent l'égalité des opportunités d'accès de tous les secteurs sociaux, à la propriété des médias. La diffusion des médias par les services publics est indispensable pour faire équilibre à la motivation commerciale des médias et pour assurer à chacun le droit à participer à la vie culturelle et politique.
25. Le régime de propriété et de gestion des connaissances comprend les brevets, les droits d'auteur, les marques déposées, et autres monopoles d'ordre légal et technique prévus par la société, ainsi que le domaine public et d'autres instruments pour permettre d'y avoir accès. Le but principal de ce système est d'arriver à un équilibre qui va optimiser l'accès et l'utilisation de ces connaissances et au même moment encourager la créativité dans la société aussi intensivement que possible. Les accords et traités internationaux et les politiques nationales concernant la création, le partage et le commerce des biens intellectuels et des créations culturelles doit se conformer à ce principe.
26. Les régimes de propriété intellectuelle et les accords nationaux et internationaux sur les brevets, les droits d'auteur et marques déposées ne doivent pas avoir la primauté sur le droit à l'éducation et à la connaissance. Ce droit doit être vraiment exercé par le biais du concept d'une utilisation équitable, à savoir, l'utilisation à des fins non-commerciales, particulièrement pour l'éducation et la recherche. En outre, le travail intellectuel et les idées, notamment les méthodes de programmation et les algorithmes, ne doivent pas être l'objet de brevet. La production et l'utilisation de logiciels et de contenus de source libre doivent être encouragées et couvertes par une politique publique adéquate.
27. La connaissance humaine est le patrimoine et la propriété de toute l'humanité et le réservoir permettant la création d'une nouvelle connaissance. La société de l'information et de la communication ne contribuera pas au développement humain et aux droits de l'homme à moins que et jusqu'à ce que l'accès à l'information soit considéré un bien public que l'état doit protéger et promouvoir. L'information dans le domaine public doit être facilement accessible afin de fournir un soutien à la société de l'information. Les droits à la propriété intellectuelle ne doivent pas être protégés comme une fin en soi, mais plutôt comme un moyen de promouvoir un domaine public riche, un partage de connaissances, des progrès scientifiques et techniques, la diversité culturelle et linguistique et la libre circulation des informations. Les institutions publiques comme les bibliothèques, les archives, les musées, les collections culturelles, et les autres points d'accès de la communauté, doivent être renforcés pour promouvoir la préservation des dossiers documentaires et un accès libre et équitable à l'information. Les scientifiques, les universités, les institutions académiques et organismes de recherches jouent un rôle primordial dans le développement de la société de l'information, le partage des résultats des recherches, de la connaissance scientifique et des informations techniques.
Gouvernance démocratique
28. Une bonne gouvernance de la société de l'information et de communication doit se fonder sur des valeurs de participation, de transparence, de responsabilité et de droit. Ces principes s'appliquent à la gestion démocratique des organismes internationaux traitant des technologies de l'information et de la communication. Ces dernières ne connaissant pas de frontières, les organes décisionnels doivent assurer le respect des principes de démocratie et d'ouverture, ainsi que la légalité et la souveraineté. En particulier, la gestion des ressources de base de l'Internet, qui sont les protocoles, les normes et les identifiants de l'Internet, tels que les noms des domaines, les adresses IP, doivent servir les intérêts publics aux niveaux mondial, national et local. En outre, toute décision concernant les protocoles, les normes et les identifiants doit être compatible avec les normes internationales des droits de l'homme, et particulièrement les droits à la liberté d'expression et à la vie privée, et doit respecter le principe de non-discrimination. De telles décisions devraient également donner lieu à une circulation plus équilibrée des informations.
29. La bonne utilisation des technologies de l'information et de la communication doit renforcer la démocratie, en améliorant les moyens et l'accès de la société civile à une participation complète dans les affaires publiques. Les technologies de l'information et de la communication peuvent améliorer l'accès à la justice et faire en sorte que les services publics soient plus réactifs, transparents et responsables. Un état de droit est indispensable pour que la société de l'information devienne un espace de confiance et de sécurité respectant entièrement les droits de l'homme.
30. Les acteurs étatiques et privés ont tous deux le devoir de respecter et de promouvoir la dignité humaine et les droits de l'homme lors de la construction de la société de l'information. Toute réglementation et tout autocontrôle concernant la communication et l'information doivent être fondés sur le strict respect des droits de l'homme et contribuer à leur promotion. Les services privé et public et les médias de la communauté ainsi que les journalistes dont l'indépendance et l'accès aux informations doivent être protégés, ont des responsabilités majeures dans la société de l'information et de la communication, car c'est là le moyen de protéger et de faire avancer la démocratie.
Mécanismes de contrôle
31. En préparation au SMSI qui se tiendra à Tunis en 2005, une commission indépendante sur la société de l'information et des droits de l'homme, composée d'experts hautement qualifiés ayant une large représentation géographique, devrait être mise sur pied pour contrôler les pratiques et politiques et soumettre des recommandations au sommet. Son mandat pourrait comprendre un examen des réglementations et pratiques internationales en matière de technologies d'information et de communication et leur conformité avec les normes internationales des droits de l'homme, la gouvernance des organes décisionnels actuels dans les domaines des technologies de l'information et de la communication et les applications potentielles de ces technologies en vue de réaliser le droit au développement et les droits de l'homme, essentiels pour un développement humain durable, notamment le droit à la santé, à une alimentation convenable et à l'éducation.
32. En outre, l'importance des questions relatives aux droits de l'homme du SMSI justifie la création, dans le cadre des procédures de la Commission sur les Droits de l'Homme ou sa sous-commission, d'une position de rapporteur spécial des droits de l'homme et de la société de l'information. Il aurait pour mandat de surveiller les développements dans ce domaine, notamment les menaces qui pourraient se poser à la vie privée, à la liberté d'expression et la liberté à ne pas être surveillé, et les applications des technologies de l'information et de la communication à la réalisation des droits économiques, sociaux, et culturels et à l'éducation en faveur des droits de l'homme. En outre, il recommanderait les mesures susceptibles de promouvoir les droits de l'homme dans la société de l'information.
Annexe - Participants au Colloque
José Luís Aguirre Alvis
National Director CRIS, Bolivia
Geneviève Ancel
Conseillère Technique, Communauté Urbaine du Grand Lyon, France
Amir Hossein Barmaki
Programme Consultant, Iranian Civil Society Training and Research Center, Iran
Wolfgang Benedek
Director, European Training and Research Centre for Human Rights and Democracy, Austria
Nestor Busso
ALER- Asociación Latinoamericana de Educación Radiofónica, Argentina
Juliana Cano Nieto
Coordinator, Fundacion para la libertad de la Prensa- FLIP, Columbia
Ivanka Corti
Former CEDAW member and Chairperson, Italy
Cheick Dumar Coulibaly
Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, Mali
Kani Coulibaly-Diabate
Medecin Lieutenant Colonel, Spécialiste en droits et Protection des Enfants Impliqués dans les Conflits, Mali
Sandra Coulibaly-Leroy
Deputy Director, Organization internationale de la Francophonie, France
Satya Brata Das
Principal , Cambridge Strategies Inc., Canada
Mamadou Gaoussou Diarra
Avocat et Membre du Conseil d'Administration, PDHRE, Mali
Francesco di Castri
Directeur émérite de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), France-Italy
Markus Duerst
Programme Officer , SDC-Governance Division, Swiss Agency for Development and Cooperation, Switzerland
Gustavo Gómez
Director, Programa de Legislaciones y Derecho a la Comunicación, Asociación Mundial de Radios Comunitarias América Latina y el Caribe (AMARC-ALC), Uruguay
Robert Guerra
Managing Director, Privaterra, Canada
Deborah Hurley
Director, Harvard Information Infrastructure Project, USA
Sharon Hom
Executive Director, Human Rights in China, USA
Kim Jeong-woo
International Coordinator, Korean Progressive Network, Rep. of Korea
Rikke Frank Jorgensen
Senior Adviser, Danish Institute for Human Rights, Denmark
Sacha Jotisalikorn
Forum Asia, Thailand
Ramin Kaweh
Programme Expert, UN-NGLS, UNCTAD, Geneva
Zdzislaw Kedzia
Chief, Research and Right to Development Branch, Office of the UN High Commissioner for Human Rights, Geneva
Lachman M. Khubchandani
Professor of Linguistics; Consultant, Centre for Development of Advanced Computing; Director, Centre for Communication Studies, India
Shulamith Koenig
Founder and Executive Director of PDHRE; President Emeritus, Israel, USA
Catherine Lalumière
Member of the European Parliament; former Secretary-General of the Council of Europe, France
Manon Lavoie
Professor of Law (Human Rights and Indigenous Peoples), Faculty of Law: Common Law Section, University of Ottawa, Canada
Peter Leuprecht
Professor, Faculty of Law, McGill University, Montreal, Quebec, Canada
Chair of the Symposium
Walther Lichem
Director, Department for International Organisations, Ministry for Foreign Affairs, Austria
Hani Mansourian
Society for the Civil Protection of and Assistance to Socially Disadvantaged, Iran
Stephen P. Marks
FXB Professor , Director, Center for Health and Human Rights, Harvard School of Public Health, USA
Chair, Committee of Rapporteurs
Meryem Marzouki
IRIS- Imaginons un réseau Internet solidaire, France
Alana Maurushat
Deputy Director, Information Technology Law Programme, Faculty of Law, University of Hong Kong, Hong Kong
Emmanuel Njenga
APC Africa, WSIS Coordinator, Kenya
Rik Panganiban
Special Advisor, World Federalist Movement, Switzerland
Anja Prodoehl
Programme Officer, Swiss Agency for Development and Cooperation, Switzerland
Stéphanie Perrin
President, Digital Discretion Inc., Canada
Bertrand Ramcharan
Acting United Nations High Commissioner for Human Rights, Geneva
Key-note Speaker
Jean-Louis Roy
President, Rights and Democracy, Montreal; former Secretary General of the Organization internationale de la Francophonie, Canada
Alwata Ishata Sahi
Membre du Conseil d'Administration (CA) de PDHRE- Mali, Mali
Adama Samassekou
President of PrepCom for WSIS 2003, Mali
Djely Karifa Samoura
African Commission of Health and Human Rights Promoters
Sèan Ò Siòchru
Spokesperson, Communication Rights in the Information Society, Ireland
Ibrahim Soilihi
Director, African Learning Institute for Human Rights Education, PDHRE Mali, Comores/France
Paul H.J. Smeets
Constitutional Affairs and Legislation Department, Ministry of Interior, Kingdom Relations and Human Rights, Netherlands
Anoop Sukumaran
Focus on the Global South, Thailand
Pàll Thòrhallsson
Administrative Officer, Media Division, Directorate General of Human Rights - Council of Europe, Strasbourg
Nsongurua Udombana
Senior Lecturer & Acting Head, Dept. of Jurisprudence & International Law, University of Lagos, Nigeria
Peter K. Yu
Adjunct Professor, Telecommunication, Information Studies and Media, Michigan State University-DCL College of Law, USA