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Loi sur la liberté de communication

Discussion en nouvelle lecture au Sénat
Sélection des passages relatifs à Internet

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SÉNAT Compte rendu analytique officiel 

SÉNAT

Compte rendu analytique officiel

SÉANCE DU MARDI 27 JUIN 2000 (105 e séance de la session ordinaire de 1999-2000)

PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE, VICE-PRÉSIDENT

La séance est ouverte à 9 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d usage.

[...]

Liberté de communication
(Nouvelle lecture)

M. LE PRÉSIDENT. L ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi adopté avec modifications par l Assemblée nationale en nouvelle lecture, modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

[...]

Mme POURTAUD. [...]

Après l affaire Valentin Lacambre, il fallait clarifier la responsabilité des hébergeurs de sites. On doit rassurer les acteurs de la société de l information, si l on veut comme le souhaite le gouvernement, que la France y tienne toute sa place. C est pourquoi, il ne me semble pas opportun de revenir à des dispositions extrêmement répressives, y compris pour les personnes physiques, comme le propose la commission. Enfin, je ne crois pas que ce texte remette en cause l anonymat sur l internet contrairement aux craintes exprimées par plusieurs associations puisqu il autorise l usage du pseudonyme.

[...]

M. PELCHAT. À l occasion de la troisième lecture de ce projet de loi, mon intervention tournera autour du chiffre trois.

Trois comme trois ans de discussions, d auditions, de débats&et comme trois ministres, nécessaires à l élaboration de cette loi sur la liberté de communication ! N est-ce pas un peu trop pour un texte qui, finalement, ne satisfait personne ou si peu de monde ? Mais aussi trois, comme les trois sujets que j estime les plus importants.

Tout d abord, je voudrais revenir sur mes propositions concernant internet. Il est très important de responsabiliser les fournisseurs d accès quant aux contenus qu ils transportent et de bien définir leurs activités afin de ne pas les confondre avec celles de moteur de recherche ou de portail. Un fournisseur d accès permet la connexion de télécommunication de l ordinateur à internet, comme A.O.L. par exemple. Une fois la connexion effectuée, le service en ligne permet de faire des recherches. C est ce qu on appelle le portail, comme Yahoo. Quant à l outil qui permet de trouver les informations sur internet avec simplement un mot clé, on l appelle le moteur de recherche comme Lycos.

Dans ce triptyque, seul le fournisseur d accès peut être tenu pour responsable. Je regrette donc que l Assemblée nationale soit revenue sur le texte que nous avions adopté.

[...]

M. RENAR. [...]

À côté de l audiovisuel, ce texte aborde également la liberté sur internet, notamment par l article premier A, dont nos avons déjà dit les inquiétudes qu il nous inspire.

Introduit à l Assemblée nationale par un amendement de M. Bloche, cet article exonérait initialement de toute responsabilité les fournisseurs d accès quant au contenu du réseau. Cette disposition visait à mettre un terme à de nombreux contentieux.

Au fil des amendements, la rédaction que nous connaissons risque d aggraver la situation. En effet, le troisième alinéa du texte prévu pour l article 43-6-2, stipule que les fournisseurs d accès ou hébergeurs de sites seront responsables dès lors qu ils n auront pas procédé aux diligences appropriées. Cette définition devrait nourrir de nombreux conflits.

En outre, cette rédaction peut inciter un certain nombre de fournisseurs d accès ou d hébergeurs de sites à exercer une censure a priori des contenus.

Dès lors, la liberté constitutionnelle de communication serait laissée à l appréciation des fournisseurs d accès !

Cette rédaction est contraire à la philosophie du réseau. Elle ne permettra pas de juguler les délits sur l internet, que nous souhaitons au demeurant relativiser.

Le second aspect de cet article oblige chaque internaute, potentiellement éditeur de contenu, à décliner son identité sinon sur le réseau, à tout le moins à son hébergeur de site ou à son fournisseur d accès. Outre qu il est toujours possible de remonter jusqu à l acteur d un fait délictueux sur internet via les informations de connexion, cette disposition présente de sérieux risques pour le respect de la vie privée.

[...]

La discussion générale est close.

M. LE PRÉSIDENT. Je rappelle au Sénat que seuls restent en discussion les articles n ayant pas été votés en termes identiques par les deux Assemblées.

Article premier A

I. Le titre II de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
Dispositions relatives aux services de communication en ligne autres que de correspondance privée
Article 43-6-1. Les personnes physiques ou morales dont l activité est d offrir un accès à des services de communication en ligne autres que de correspondance privée sont tenues, d une part, d informer leurs abonnées de moyens techniques permettant de restreindre l accès à certains services ou de les sélectionner, d autre part, de leur proposer au moins un de ces moyens.
Article 43-6-2. Les personnes physiques ou morales qui assurent, à titre gratuit ou onéraux, le stockage direct et permanent pour mise à disposition du public de signaux, d écrits, d images, de sons ou de messages de toute nature accessibles par ces services, ne sont pénalement ou civilement responsable du fait du contenu de ces services que :
- si, ayant été saisies par une autorité judiciaire, elles n ont pas agi promptement pour empêcher l accès à ce contenu ;
- ou si, ayant été saisies par un tiers estimant que le contenu qu elles hébergent est illicite ou lui cause un préjudice, elles n ont pas procédé aux diligences appropriées ;
Article 43-6-3. Les prestataires de services mentionnés aux articles 43-6-1 et 43-6-2 sont tenus de détenir et de conserver les données de nature à permettre l identification de toute personne ayant contribué à la création d un contenu des services dont elles sont prestataires.
Ils sont également tenus de fournir aux personnes qui éditent un service de communication en ligne autre que de correspondance privée des moyens techniques permettant à celles-ci de satisfaire aux conditions d identification prévues à l article 43-6-4.
Sans préjudice de l application éventuelle des dispositions de l article 226-22 du Code pénal, le fait d utiliser les données mentionnées au premier alinéa à des fins autres que de répondre à des demandes des autorités judiciaires qui peuvent en requérir communication auprès des prestataires mentionnés aux articles 43-6-1 et 43-6-2 est puni des peines prévues à l article 226-21 du Code pénal.
Un décret en Conseil d État définit les données mentionnées au premier alinéa et détermine la durée et les modalités de leur conservation.
Article 43-6-4. I. Les personnes dont l activité est d éditer un service de communication en ligne autre que de correspondance privée tiennent à la disposition du public :
- s il s agit de personnes physiques, leurs nom, prénom et domicile ;
- s il s agit de personnes morales, leur dénomination ou leur raison sociale et leur siège social ;
- le nom du directeur ou du co-directeur de la publication et, le cas échéant, celui du responsable de la rédaction au sens de l article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ;
- le nom, la dénomination ou la raison sociale et l adresse du prestataire mentionné à l article 43-6-2.
II. Les personnes éditant à titre non professionnel un service de communication en ligne autre que de correspondance privée peuvent ne tenir à la disposition du public, pour préserver leur anonymat, que le nom, la dénomination ou la raison sociale et l adresse du prestataire mentionné à l article 43-6-2, sous réserve de lui avoir communiqué les éléments d identification personnel prévus au I.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 137, présenté par MM. Ralite, Renar et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

M. RENAR. Nous avons déjà alerté la représentation nationale des dispositions relatives à l internet.

Des associations s inquiètent, car cet article contrevient à la philosophie du réseau, menace l anonymat et la vie privée, sans permettre d éviter les délits. En fait, l article est inutile, puisqu il est toujours possible de remonter jusqu à l ordinateur.

La référence aux « diligences appropriées » des fournisseurs d accès revient à leur confier un droit de censure a priori, alors que la justice devrait seule pouvoir supprimer les contenus litigieux.

Nous proposons de donner le temps de la réflexion. Nous attendons beaucoup d un texte sur la société de l information pour concilier les droits et les devoirs des internautes.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 2, présenté par M. Hugot au nom de la commission des Affaires culturelles.

I. Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l intitulé du chapitre VI du titre II de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
Dispositions relatives aux services de communication en ligne
II. En conséquence, dans le texte proposé par cet article pour l article 43-6-1 de la même loi, supprimer les mots : « autres que de correspondance privée ».
III. En conséquence, dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l article 43-6-3 de la même loi, dans le premier alinéa du I et dans le II du texte proposé par cet article pour l article 43-6-4 de la même loi, supprimer les mots : « autre que de correspondance privée ».

M. HUGOT, rapporteur. Le retour à la rédaction du Sénat présente l avantage d être cohérent avec la loi de 1986.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 3, présenté par M. Hugot au nom de la commission des Affaires culturelles.

Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l article 43-6-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée :
Les personnes exerçant l activité de prestataire de services d accès à des services de communication en ligne ou d hébergement de tels services peuvent être tenues pénalement ou civilement responsables du fait du contenu de ces services :

M. HUGOT, rapporteur. En premier lieu, le retour à la terminologie du Sénat évite les périphéries utilisées par l Assemblée nationale pour désigner imparfaitement les hébergeurs. En effet, les données sont stockées par les éditeurs. En outre, la volatilité des données est peu compatible avec l expression de stock permanent.

En second lieux, nous proposons d obliger les hébergeurs à obéir aux injonctions de la justice d interdire l accès à un site. L Assemblée nationale estime que le droit commun suffit. On pourrait en dire autant à propos des hébergeurs...

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 125, présenté par M. Pelchat.

Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l article 43-6-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :

Toute personne exerçant l activité de prestataire de services d accès à un réseau de télécommunications sur lequel sont fournis des services de communication en ligne ou d hébergement de tels services peut être tenue pénalement ou civilement responsable du fait du contenu de ces services :

M. PELCHAT. Il faut éviter la confusion terminologique. Le fournisseur d accès est le prestataire technique qui fournit un accès à un réseau de télécommunications, c est-à-dire à l infrastructure sur laquelle sont fournis des services de communication en ligne. Cette définition figure dans la directive sur le commerce électronique.

Or, le projet, qui en donne une définition différente, beaucoup plus large, aux termes de laquelle le fournisseur d accès donne accès à des services de communication en ligne, englobe à tort l activité de moteur de recherche ou de portail, ce qui n a rien à voir.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 126, présenté par M. Pelchat.

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l article 43-6-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
- Si, ayant reçu une réclamation faisant état du caractère illicite ou préjudiciable à des tiers d un contenu dont elle assure l hébergement ou ayant eu connaissance de faits de nature à faire suspecter le caractère illicite ou préjudiciable de ce contenu, elle n a pas accompli les diligences appropriées, notamment afin de retirer ledit contenu ou d en rendre l accès impossible ;

M. PELCHAT. Le texte de la commission dispose que le fournisseur d hébergement qui a connaissance du caractère illicite ou préjudiciable à des tiers d un contenu doit simplement accomplir des « diligences appropriées ». S il est parfaitement concevable que le fournisseur d hébergement doive prendre des mesures appropriées lorsqu il est saisi d une réclamation ou s il a connaissance d éléments de nature à faire suspecter le caractère illicite ou préjudiciable à un tiers d un contenu, afin de vérifier la réalité de l illicéité ou du caractère préjudiciable de ce contenu, le fournisseur d hébergement doit en revanche, dès lors que cette illicéité ou ce caractère préjudiciable ne peuvent sérieusement faire de doute, retirer promptement ce contenu ou en rendre l accès impossible.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 4, présenté par M. Hugot au nom de la commission des Affaires culturelles.

Rédiger comme suit le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l article 43-6-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée :
- ou si, ayant eu connaissance du caractère illicite ou préjudiciable à un tiers d un contenu dont elles assurent l hébergement, elles n ont pas accompli les diligences appropriées.

M. HUGOT, rapporteur. Nous revenons au texte du Sénat.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 127, présenté par M. Pelchat.

Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l article 43-6-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
- ou si, en tant que prestataire de service d accès, ayant été destinataire d une mise en demeure d un tiers estimant que le contenu auquel elle fournit l accès est illicite ou lui cause un préjudice, dans des conditions et suivant une procédure définie par décret en Conseil d État, elle n a pas accompli les diligences appropriées compte tenu des moyens techniques disponibles.

M. PELCHAT. Mon amendement vise à protéger les droits d auteurs et à interrompre les atteintes à l ordre public sur les réseaux en instaurant une procédure extra-judiciaire inspirée du principe américain du Notice and take down. C est essentiellement auprès des fournisseurs d accès qu il sera possible de mettre fin aux activités illicites en France des services en ligne situées à l étranger, qui sont très nombreux. Dans ces conditions, les fournisseurs d accès sont appelés à devenir des interlocuteurs nécessaires dans la lutte contre les contenus illicites et il est indispensable qu ils soient soumis à des obligations dont le non-respect engage leur responsabilité.

À défaut, le législateur créerait une zone de non-droit au bénéfice des sites et hébergeurs étrangers, au détriment des ayants-droits, ainsi que des sites et hébergeurs situés en France. Un régime de responsabilité propre aux fournisseurs d accès, encadré par un décret en Conseil d État, est compatible avec les dispositions de la directive sur le commerce électronique applicables aux fournisseurs d accès, qui « ne concerne pas les obligations de surveillance applicables à un cas spécifique et, notamment, elle ne fait pas obstacle aux décisions des autorités nationales prises conformément à la législation nationale ».

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 5, présenté par M. Hugot au nom de la commission des Affaires culturelles.

Après les mots :
« ayant contribué à la création », rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l article 43-6-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée :
« du contenu de services de communication en ligne ».

M. HUGOT, rapporteur. C est un amendement rédactionnel.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 146, présenté par le gouvernement. Les autorités judiciaires peuvent requérir communication auprès des prestataires mentionnés aux articles 43-6-1 et 43-6-2 des données mentionnées au premier alinéa. Les dispositions des articles 226-21 et 226-22 du Code pénal trouvent application.
Un décret en Conseil d État, pris après avis de la commission nationale de l informatique et des libertés, définit les données mentionnées au premier alinéa et détermine la durée et les modalités de leur conservation.

Mme TASCA, ministre de la Culture. La C.N.I.L. a suggéré de clarifier cet article en le rapprochant davantage de la loi informatique et liberté.

Sans prévoir une infraction particulière, la rédaction nouvelle de l alinéa 3 renvoie aux dispositions applicables en la matière, particulièrement au détournement de finalité de fichier.

L alinéa 4 soulignera que les données en question sont des données personnelles protégées par la loi du 6 janvier 1978. Le renvoi à l avis de la C.N.I.L. pour l adoption du décret est conforme aux dispositions de l article 28-2 de la directive du 24 octobre 1995 prévoyant la consultation des autorités de contrôle pour l élaboration des mesures réglementaires ou administratives relatives à la protection des droits et libertés des personnes à l égard du traitement de données à caractère personnel.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 6, présenté par M. Hugot au nom de la commission des Affaires culturelles.

Dans le quatrième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l article 43-6-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, supprimer les mots : « et, le cas échéant, celui du responsable de la rédaction ».

M. HUGOT, rapporteur. Amendement rédactionnel.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 7, présenté par M. Hugot au nom de la commission des Affaires culturelles.

Dans le II du texte proposé par cet article pour l'article 43-6-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, supprimer les mots : «, pour préserver leur anonymat, ».

M. HUGOT, rapporteur. Amendement rédactionnel.

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 8, présenté par M. Hugot au nom de la commission des Affaires culturelles.

A) Compléter, in fine, cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II. Après l'article 79-6 de la même loi, il est inséré un article 79-7 ainsi rédigé :
Est puni de trois mois d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende le fait, pour une personne physique ou le dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale exerçant l'activité d'éditeur de service de communication en ligne, de tenir à la disposition du public ou de communiquer à un prestataire technique, en application de l'article 43-6-4, de faux éléments d'identification des personnes mentionnées aux deuxième, troisième et quatrième alinéas du I du même article.
Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables de cette infraction. Les peines encourues par les personnes morales sont :
- l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du Code pénal ;
- les peines complémentaires prévues aux 2°), 4°) et 9°) de l'article 131-39 du Code pénal.
B) En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention : « I. ».

M. HUGOT, rapporteur. Nous rétablissons les sanctions pénales que nous avions prévues contre les éditeurs de service qui fournissent une fausse identité car si l'on peut admettre, au nom du principe d'égalité devant la loi, l'application du droit commun aux prestataires techniques qui ne défèrent pas à la réquisition d'une autorité judiciaire, le même principe conduit à s'interroger sur les peines qui seraient applicables aux éditeurs de services de communication en ligne. En effet, les éditeurs de services de communication audiovisuelle soumis à autorisation ou de services soumis à déclaration qui ne satisfont pas aux obligations d'identification déjà prévues par la loi de 1986 commettent un délit sanctionné d'une amende de 40 000 francs.

Ne punir que d'une amende contraventionnelle le défaut d'identification des éditeurs de services en ligne pouvait déjà apparaître comme une différence de traitement peu justifiable. La fourniture d'une fausse identité révèle une intention de tromper. Et les éditeurs non professionnels sont autorisés à rester anonymes.

La commission est défavorable à l'amendement n° 137 et le serait au n° 125 si M. Pelchat le maintenait.

M. PELCHAT. Il a tout à fait sa place !

M. HUGOT, rapporteur. Notre commentaire est identique sur les amendements n os 126 et 127. Quant à l'amendement du gouvernement, nous souhaiterions qu'il soit complété pour viser l'article 226-17 du Code pénal. (Mme la ministre marque son accord.)

M. LE PRÉSIDENT. Amendement n° 146 rectifié, présenté par le gouvernement.

Rédiger comme suit les deux derniers alinéas du texte proposé par cet article pour l'article 43-6-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
Les autorités judiciaires peuvent requérir communication auprès des prestataires mentionnés aux articles 43-6-1 et 43-6-2 des données mentionnées au premier alinéa. Les dispositions des articles 226-17, 226-21 et 226-22 du Code pénal sont applicables au traitement de ces données.
Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, définit les données mentionnées au premier alinéa et détermine la durée et les modalités de leur conservation.

Mme TASCA, ministre de la Communication. Je suis défavorable à l'amendement de M. Renar. Depuis un an, le débat sur les hébergeurs a été riche et dès mon arrivée rue de Valois j'ai souhaité une ample concertation qui a permis des progrès sur les diligences appropriées, destinées à éviter les censures de précaution. Il fallait respecter l'anonymat des personnes physiques sur un réseau décentralisé. Si le débat démocratique a permis des avancées, le législateur doit rester prudent. Nous allons vers l'instauration d'un état de droit à propos des hébergeurs, le texte sur la sécurité de l'information traitera les autres aspects. Je m'interroge sur la philosophie du réseau car dans cet espace de liberté, ni la représentativité des intervenants, ni le poids relatif des opinions ne peuvent être contrôlés. Nous devons avancer avec circonspection.

Remettre à plus tard, voire à beaucoup plus tard un premier encadrement de cette responsabilité me paraît préjudiciable.

Avis défavorable aux amendements n os 2 et 3.

Même avis sur l'amendement n° 125. Je ne considère pas qu'il y ait un risque de confusion entre la responsabilité des fournisseurs d'accès et celle des hébergeurs. Avis défavorable également à l'amendement n° 126. Il importe d'éviter d'instaurer une censure de précaution. Il n est pas souhaitable de réduire a priori l'action des hébergeurs. Avis défavorable à l'amendement n° 4. Même avis sur l'amendement n° 127. Si je partage l'intention de ses auteurs, il me paraît préférable de s en tenir à notre rédaction.

Avis défavorable à l'amendement n° 5, s'agissant des obligations de détention et de conservation des données qui permettraient d'identifier les personnes ayant contribué à la création d'un contenu des services dont les hébergeurs et les fournisseurs sont prestataires.

Sur l'amendement n° 6, le gouvernement s en remet à la sagesse du Sénat. Avis défavorable aux amendements n os 7 et 8.

M. RENAR. J'ai l'impression, madame la Ministre, de ne pas me trouver sur le même versant de la montagne que vous. Le mien est moins ensoleillé...

M. LE PRÉSIDENT. Cela s'appelle l'ubac ! (Sourires.)

M. RENAR. Je viens du plat pays, qui culmine au mont Cassel, à 190 mètres d'altitude...

La responsabilité des rédacteurs de tractes et d'affichettes peut être contestée de la même façon que des fournisseurs d'accès. Je ne suis pas pour une réforme hâtive dans ce domaine sensible. Il me paraît urgent d'attendre, non pas passivement, mais en mettant la question des droits et des devoirs des internautes au coeur de notre réflexion. Les droits ne doivent pas octroyés mais concertés. Je maintiens donc mon amendement, qui est une pétition de principe.

L'amendement n° 137 n est pas adopté.

L'amendement n° 2 est adopté ainsi que l'amendement n° 3.

L'amendement n° 125 devient sans objet.

M. PELCHAT. Contrairement à ce que vous dites, madame la Ministre, j estime que la loi ne distingue pas de manière suffisamment précise les fournisseurs d'accès et les hébergeurs de sites.

Or une telle distinction me paraît nécessaire pour éviter tout contentieux. Mon amendement n° 127 est destiné à éviter des dérives que nous constatons déjà, je pense en particulier au piratage d'oeuvres économiques et industrielles. Regardons ce qui se passe dans les pays qui sont en avance sur nous, comme les États-Unis : ils ont adopté une réglementation. Faisons de même, sans attendre que les choses s aggravent.

S'agissant de l'amendement n° 126, on m'objecte qu'il faut attendre les décisions de justice. Mais combien de temps ? Des mois, des années ? La justice comporte de multiples recours. C est bien mais c'est long !

Pendant ce temps, les affaires fondées sur des exploitations condamnables continuent tranquillement. Il faut faire la police, car internet, c'est la liberté, mais pas l'anarchie !

M. DEL PICCHIA. Très bien !

L'amendement n° 126 n est pas adopté.

L'amendement n° 4 est adopté.

L'amendement n° 127 devient sans objet.

L'amendement n° 5 est adopté.

L'amendement n° 146 rectifié, est adopté.

Les amendements n os 6, 107 et 108 sont successivement adoptés.

L'article premier A, modifié, est adopté.

 

(dernière mise à jour le 16/06/2019) - webmestre@iris.sgdg.org